Aller-retour hivernal en Arménie
C'est donc le mercredi 17 décembre à 17 h que j'entre en Arménie.
A la sortie de Meghri, le premier village d'Arménie, je suis pris en stop par Hovo dans sa vieille camionette 4x4. Il me propose de m'emmener pour 12 kms. C'est toujours ça à prendre. Quand on arrive là où il pensait me déposer, il remarque qu'il fera bientôt nuit et me propose de me redescendre à un hôtel de Meghri. Je lui demande si je ne peux pas plutôt dormir chez lui. Il sourit et accepte.
Il me dépose dans sa ferme dans un hameau de montagne. Il me laisse avec ses trois gamins de 10, 9 et 3 ans avant de repartir pendant 2 hs pour, j'imagine, s'occuper des dernières activités de la ferme. Je passe ce temps à rigoler avec le plus petit et à donner des coups de pouce stratégiques aux plus âgées dans leur jeux vidéo sur internet.
Quand les parents reviennent, je montre quelques photos de ma famille, de la France et de mon voyage.J'expérimente ensuite la douche, en hiver, en Arménie. La maison est composée d'une grande pièce qui sert à la fois de hall d'entrée et de cuisine. Sur la droite au fond, il faut descendre quelques marches pour trouver la salle de bain. Les toilettes sont à l'extérieur, dans la cabane au fond du jardin. Et enfin, une petite pièce sur la gauche à l'entrée sert de salle de vie, de salle à manger et de chambre à coucher car elle seule est chauffée. Et dehors, il fait froid, c'est l'hiver d'Arménie.
Oui, c'est ça, la salle de bain n'est pas chauffée! Il est par contre possible d'avoir de l'eau chaude en allumant le ballon d'eau quelques minutes en avance.
Qu'est-ce qui est le plus difficile? Une douche dans le froid avec de l'eau chaude (hiver en Arménie) ou une douche dans le chaud avec de l'eau froide (hiver au Népal)?
Nous nous couchons tôt car les activités de la ferme démarrent à 5h.
Hovo nous réveille à 7h30 car les enfants vont à l'école, et moi j'ai de la route. Le petit déjeuner se compose essentiellement "d'oeuf à la coque" dans un style un peu différent. Ici, l'oeuf écaillé et mélangé avec du beurre et de la mie de pain.
Au revoir mes premiers amis arméniens.
Il fait beau, le ciel est dégagé, il fait donc grave froid ! Même si la route n'a qu'une direction, je n'attends pas le pouce en l'air, je marche pour ne pas être gelé sur place. Je ne parle pas de me réchauffer, je crois que ça n'aurait pas été possible dans les virages de l'ubac.
Un premier conducteur m'emmène au col. J'attends donc le suivant, les pieds dans la neige mais sous le soleil. Un camionneur m'emmène jusqu'à Kapan puis un couple jusqu'à Goris et m'offre le café. J'ai définitivement quitté la région du monde du thé pour entrer dans celle du café, l'Iran et la Turquie étant des pays de transition. A la sortie de Goris, je suis pris en stop par deux jeunes en jeep qui vont jusqu'à Artashat, une ville à 25 kms de Yerevan, Bingo! C'est très inconfortable à l'arrière puisqu'il n'y a pas de siège. Ils m'offrent le déjeuner en route. Nous arrivons tard, à 18h10, il fait déjà nuit. Ils m'auraient volontiers hébergé mais ils n'ont pas de maison ici, ils ont un business à faire et repartent juste après pour Goris.C'est difficile de faire du stop la nuit, sans lampadaire. Heureusement, une voiture se gare peu avant moi. Ses phares m'éclairent. Un père et son fils s'arrètent pour me prendre.
Ils m'invitent chez la tante pour le café mais me laissent ensuite en ville, quelque part, après avoir refusé de m'héberger sous prétexte de manque de place. Je rencontre peu après un jeune concessionnaire de voiture. Il propose de m'aider à trouver un hôtel mais ne peut pas m'héberger (par manque de place...). Malheureusement, il me quitte avant d'avoir trouvé un hôtel. Je ne peux pas dormir dehors, je n'ai pas l'équipement pour. Je me décide finalement à appeler l'hôtel que les parents ont réservé pour le lendemain soir et m'y rends une nuit plus tôt. Ce sera au frais de la princesse. C'est un échec pour l'Arménie car à l'exception de la Chine, il me semble avoir toujours trouvé quelqu'un pour m'héberger lorsque j'étais dans le besoin.
Je ne raconte pas les jours suivants, mes vacances avec mes parents. Je laisse ce privilège à ma mère sur son site internet mamisaraconte.net , sil elle en a envie.
Nous passons deux semaines à vadrouiller en voiture autour de l'Arménie (sauf le Haut-Karabagh qu'il faut visiter à la fin du printemps ou en été).
Ils repartent le vendredi 2 janvier 2015.
J'ai trouvé un tout petit hôtel pas trop cher. Je suis le seul client pendant la majorité de mon séjour alors je discute souvent avec les jeunes gars de l'accueil.
Je dois retourner en Iran, d'abord car j'ai envie de l'explorer plus, mais aussi car c'est le seul moyen d'accéder à l'Arabie et donc l'Afrique par terre/mer. L'Irak et la Syrie ne sont pas franchement des terres d'accueil en ce moment !
J'ai changé mon plan Turquie pour le visa. Le consulat iranien de Trabzon qui était connu, parmi les voyageurs, comme l'endroit facile pour obtenir un visa a changé d'équipe et durci ses règles. Je vais donc faire ma demande ici, à Yerevan.
Malheureusement, Bahador a trainé pour faire la demande de MFA et je dois attendre longtemps, avant d'agir. J'ai aussi un peu peur que mon nom de famille soit sur une sorte de liste noire après les deux refus successifs qu'ont essuyé mes parents.
En Arménie, Noël a lieu le 6 janvier. Je suis invité par Nasguiève, un jeune de l'accueil de mon hôtel, à me joindre à lui et sa fiancée à la messe de Noël dans son église "Life Church". C'était plutôt sympa, très dynamique avec un style gospel. J'ai bien aimé sauf le speech du pasteur que j'a trouvé trop long (faut dire que je n'y comprenais rien) et politisé (il s'agitait comme les hommes politiques qui essaient de séduire).
Un soir, j'ai eu une longue discussion avec un arménien du Karabagh en russe (il ne parlait pas anglais). Ne me demandez pas comment ce fut possible, je ne connais que trois mots en russe, mais c'est comme ça. Il me raconta sa vie en Russie quand il y travaillait avant de me décrire la beauté de son pays, le Karabagh. Pourquoi ne me parlait il pas en Arménien, mystère...
Le 9 janvier, je pars pour Tidovan, un petit village à côté d'Idjevan. Mason Blum, un américain voyageur, un Cser, m'a invité via HelpX à participer aux prémisses de son projet de ferme. Il se trouve que c'est le petit fils du voisin de Mason, Artyom, qui est le dernier à me prendre en stop. Il est né ici mais vit à Yérévan avec ses parents depuis tout petit. Il parle un peu anglais.J'arrive chez Mason à 18h avec mes légumes achetés au marché d'Idjevan, en passant. Il loue un corps de ferme qu'il souhaite rénover. Il a déjà rénové une chambre dans laquelle il dort bien que le poêle à bois se trouve dans l'antichambre adjacente. La salle de bain est attenante à l'antichambre. Elle est inutilisable. La porte de la cuisine à laquelle on accède depuis l'antichambre est fermée pour garder la chaleur uniquement dans l'antichambre. Il n'y a aucune isolation. Il fait froid!
Nous discutons toujours très tard le soir car le poêle est vaillant et nous avons du mal à sortir du lit le matin car le feu est éteint. Dur, dur de se déshabiller pour se laver (toilette de chat car il n'y a pas d'eau chaude) et mettre les crèmes anti-fongiques (vous vous rappelez le médecin en Inde : "une hygiène impeccable, 3 douches par jour"... no comment).
Les voisins nous invitent à partager leur petit-déjeuner, du bouilon de boeuf. Artyom nous invite à aller randonner le lendemain. Nous passons bavarder avec Nishan, la "fille du village qui parle anglais". Elle est prof d'anglais à l'université d'Idjevan. Sa famille nous invite à déjeuner.
Le soir, Hovo, un petit garçon de 12 ans du vllage vient chez nous pour jouer au jeux vidéo.
Il revient le lendemain matin pour jouer, mais comme Artyom arrive avec son jeune cousin, Arman, 10 ans, pour aller randonner, nous lui proposons un deal. Il se joint à nous, et il pourra jouer après.
La randonnée démarre par une grimpette bien sec, dans les bois. C'était tellement pentu que nous utilisions parfois les mains pour nous hisser. J'espère que nous ne redescendrons pas par là !
Hovo et Arman s'opposent en tous points, l'un est petit et jovial, l'autre est grand et timide. Non, ce n'est pas vrai. Ils sont tous les deux plein d'énergie, intelligents et très attachants.
Nous nous reposons au sommet en mangeant des en-cas, des pommes et du pain, tout en profitant de l'incroyable vue. Hovo est mon photographe aujourd'hui. Il s'amuse à tout photographier avec mon appareil. Il est plutôt doué pour le cadrage, il faudra par contre trier les nombreux doublons :-)
Artyom est lui, photographe/caméraman professionnel. Il est aussi collectionneur d'insectes. C'est un admirateur de la nature.
Nous redescendons pas l'autre versant, plus doux, qui abrite des cascades gelées. Superbe !Les gamins me font peur à marcher et sauter sur la glace alors que le vide des cascades n'est qu'à quelques mètres. Je suis de plus en plus "protecteur" vis à vis des petits. Non, ce n'est pas ça, j'ai toujours été protecteur. Disons que maintenant, je me sens concerné. Avant, c'était juste une protection naturelle du plus faible. Aujourd'hui, il y a comme un sentiment de responsabilité :il ne doit rien leur arriver. Est-ce une certaine fibre paternelle qui me travaille?
Maman, quand je pense à ma fameuse glissade dans la cascade corse, comme tu as dû mourir d'angoisse !
Nous rentrons tard, presque à la nuit. C'est la galère pour le feu. Heureusement, Artyom vient nous inviter pour le dîner. Des dolmas (spécialité arménienne, des rouleaux de feuilles de choux farcis) en abondance, du vin sucré (comme en Géorgie) à volonté. C'est bon, c'est vivant, j'aime bien l'ambiance de famille.
J'ai dû dormir dans la grande chambre car le vent, trop fort, empêchait la fumée de s'échapper. Nous rencontrons un voisin pour obtenir de lui des conseils agricoles. Puis, nous partons ensemble pour Yerevan. Nous sommes hébergés par Victoria, une syrienne, mariée à un anglais (qui vit au Canada), la seule CSeuse active de Yérévan, une amie de Mason. C'est la fête chez elle tous les soirs.
Nous sommes 4 Cser à vivre chez Victoria. Il y a Björn et Hanz, deux allemands, Mason et moi. Hanz cuisine super bien.
Je reçois enfin le code du MFA. Je vais donc en ville repérer la banque où il faudra déposer l'argent quand l'ambassade aura elle aussi reçu le code (pourquoi c'est plus long pour elle de le recevoir, mystère...?).
Nous sommes invités à nous joindre à un évènement culinaire de CS. Cette semaine, ce sont deux colocs français, Rémy et Casimir, qui acceuillent. Au menu, de la daube avec des pommes de terre vapeur et de la salade. Hanz a amené ce qu'il a préparé, du pain de pommes de terre+oignons qui se mange avec une sauce au vin, plus une galette de lentilles. Les français nous offrent un plateau de fromages. Je me régale, bien qu'ils ne soient pas tous très faits. En dessert, un vacherin. La soirée est bien arrosée. On s'est bien amusés.
J'ai répondu au challenge de Victoria de lui trouver de la crème de sésame (ça m'a pris 3 hs dans tout Yerevan) pour qu'elle nous prépare de l' hoummous.
Elle l'a confectionné pour fêter l'obtention de mon visa et nous nous sommes régalés.
Le visa s'obtient normalement une semaine après avoir payé la somme standard. En payant le double, on l'obtient dans les 24 h. Comme je n'avais pas envie d'attendre, j'ai payé pour la version express. En insistant un tout petit peu, j'ai pu payer directement au consulat plutôt que de devoir descendre au centre ville payer à la banque. Du coup, la dame du comptoir a imprimé mon visa devant mes yeux.Je l'ai obtenu en une heure ! Pourquoi faut il une semaine en temps normal? Est-ce une manière de montrer qu'ils ont le pouvoir ? le dernier mot ? Quel jeu ridicule !
Pour notre dernière soirée, Hanz part aussi le lendemain, nous allons jouer au parc d'attractions qui se trouve proche de la statue Mother Arménia. Nous avons du mal à aller nous coucher. Hanz est super tendu. Il prévoit de faire l'aller-retour en stop en Allemagne pour aller chercher des affaires afin de s'installer plus longtemps en Arménie. 7000 kms aller en une semaine, autant pour le retour. Un beau challenge !
Aucun de mes contacts ne peut m'héberger ni à Tabriz, ni à Téhéran. Du coup j'envoie quelques requêtes sur CS. Omid me répond dans l'instant. Je peux partir l'esprit léger, sachant que j'ai un point de chute.
Je me rends d'abord jusqu'à la gare routière, en marchant et avec l'aide d'un conducteur à qui j'ai demandé mon chemin quand il faisait le plein d'essence de sa voiture. Je prends un bus de ville pour sortir de Yérévan.
Il me faut ensuite 6 voitures pour arriver jusqu'à Jermuk et un camion pour ariver chez Hovo, à Merghi. Quand j'arrive, les parents ne sont pas à la maison. Les enfants se souviennent de moi, même de mon surnom et m'invitent à entrer. Les grands jouent sur l'ordi. Je rigole avec le petit.
Puis, le cousin d'Hovo vient. Les enfants me présentent. Il m'invite chez sa mère, la voisine, à boire l'apéro.
Il parle espagnol car il a vécu là-bas pendant 7 ans. Sa femme et ses 2 enfants y sont encore. Malheureusement, il est rentré en Arménie l'année dernière pour l'enterrement de son père. Depuis, il n'arrive pas à obtenir de visa pour l'Espagne. Il était pourtant proche de pouvoir obtenir la nationalité espagnole. Il attend donc que sa femme et ses enfants l'obtiennent pour profiter du regroupement familial.
Hovo nous rejoint. Il est super content de me voir. Il apprécie que j'ai agi en ami en revenant les voir. Nous dînons avant d'aller dormir.
Comme ce sont les vacances, les enfants ne se réveillent qu'à 8h30. Je pars à 10 h, après qu'Hovo m'ait offert deux kgs de son fromage maison, un cadeau pour mes parents. J'ai insisté pour en avoir moins (que vais-je faire de 2kgs de fromage dans mon sac pendant mon voyage en Iran?) mais il n'a rien voulu entendre. Merci ! Le fromage est bien arrivé en Arabie, trois mois plus tard, le temps [d'en distribuer en chemin d'abord et] de mûrir à point pour le goût des français.
Le passage de frontière se passe bien. Et je trouve très rapidement une voiture qui se rend à Tabriz.
Je prends un bus le soir même pour me rendre rapidement à Téhéran.
Pour voir plus de photos, cliquez sur Meghri, Yerevan et Ditavan..
Commentaires
C'est marrant comme les visages des Arméniens semblent si différents de ceux des Iraniens, sur tes photos (peut-être n'est ce pas représentatif de la réalité).
Aussi, c'est super de voir la photo avec tes parents, vous êtes enfin réunis !
Je me demande comment tu arrives à te débrouiller pour faire autant de rando, en Iran et ici en Arménie, c'est génial... Je n'ai pas l'occasion d'en faier une seule en Iran !
Ah ces histoires de visa.... 5 minutes pour l'imprimer devant tes yeux lorsque tu sors les billets, alors qu'il faut plusieurs jours en temps normal... Quelle belle arnaque ! Tu as raison je crois qu'ils ont besoin de montrer leur pouvoir, ils se font désirer et se sentent puissants ainsi.. et puis ca leurs permet de proposer un service "express" pus cher et de s'en mettre "moralement" plein les poches car beaucoup de gens sont prets à payer (ou ne peuvent pas attendre un semaine)...
Je suis impatient de lire ton retour en Iran !
@Isabelle et Julien : Ça étonne quelqu'un que je parle de fibre paternel
@Julien : tu as raison, les iraniens et les arméniens n'ont pas du tout le même look.
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